Le nouveau chef de la diplomatie britannique, Boris Johnson, le 14 juillet 2016 à Londres |
Boris Johnson a sidéré le monde en menant le camp du
Brexit à la victoire puis en renonçant à briguer le poste de Premier ministre:
Mercredi, il a rebondi spectaculairement en devenant ministre des Affaires
étrangères.
Sa carrière semblait pourtant enterrée lorsqu'il a
expliqué il y a deux semaines qu'il ne comptait pas se porter candidat au poste
de Premier ministre suite à la démission de David Cameron.
Après avoir détaillé les qualités indispensables pour
briguer le poste et mener à bien les négociations avec Bruxelles, le député
conservateur de 52 ans, rebaptisé "Boxit" sur internet, avait conclu:
"Je ne peux pas être cette personne".
Un coup de théâtre pour ce trublion de la vie politique à
la tignasse blonde ébouriffée qui avait pourtant battu le pavé et la campagne
anglaise sans relâche pour convaincre une majorité de Britanniques de
"reprendre le contrôle" de leur destin. Et avait réussi son pari.
Traitre, menteur, lâche... Insulté devant son domicile,
conspué par des manifestants devant le Parlement, ridiculisé sur internet,
celui qui a été l'un des hommes politiques préférés des Britanniques pendant
ses huit années à la mairie de Londres est devenu, pendant les quelques jours
qui ont suivi le Brexit, l'ennemi public numéro 1, en particulier dans sa ville
cosmopolite et pro-UE.
"Boris a perdu le respect de beaucoup de monde",
déclarait ainsi à l'AFP Clare Johnson, une institutrice londonienne qui
manifestait récemment à Trafalgar Square contre le Brexit.
- 'Roi du monde' -
Loin de faire taire les accusations de mensonges et
d'impréparation, "BoJo" s'était contenté, après l'annonce des
résultats, de temporiser et de se montrer rassurant, en affirmant que le pays
"ne tournait pas le dos à l'Europe", sans offrir pour autant de
stratégie concrète.
Si cette attitude indignait son propre camp, personne ne
pensait qu'elle annonçait un abandon pur et simple par un homme dont les
ambitions semblaient cultivées depuis l'enfance. Un abandon qui n'aura
finalement duré que deux semaines.
Né à New York en 1964, Alexander Boris de Pfeffel Johnson
voulait être "roi du monde" dès son plus jeune âge, a confié sa s?ur
Rachel à son biographe Andrew Gimson.
Au fil d'une éducation élitiste, cet aîné d'une fratrie de
quatre n'a eu de cesse d'affirmer ses rêves de grandeur, ayant décroché une
bourse pour le prestigieux Eton College et le non moins glorieux poste de
président du club de débat Oxford Union.
"Personne à (l'université d')Oxford ne doutait qu'il
serait un jour Premier ministre", pointe M. Gimson.
Il entame ensuite une carrière journalistique au Times,
qui le licencie à peine un an plus tard pour avoir inventé une citation, et
avoir menti sur le fait de l'avoir inventée.
Le Daily Telegraph le repêche et l'envoie à Bruxelles, où
il officiera de 1989 à 1994.
- Journaliste 'favori' de Thatcher -
Déjà, à coup d'exagérations et même parfois
d'entourloupes, Boris Johnson bouscule la couverture de l'époque et devient
"le journaliste favori" de Margaret Thatcher en relatant par le menu
les actions les plus insolites de l'exécutif européen (taille des saucisses,
toilettes...).
"Il n'inventait pas à proprement parler les histoires
mais il était dans l'exagération", se souvient Christian Spillmann, journaliste
de l'AFP en poste à Bruxelles pendant "les années Boris".
C'est également à Bruxelles que son premier mariage avec
Allegra Mostyn-Owen, rencontrée à Oxford, se délite et qu'il renoue avec une
amie d'enfance, Marina Wheeler, aujourd'hui son épouse et la mère de ses quatre
enfants.
Elu député pour la première fois en 2001, c'est en
ravissant la mairie de Londres aux travaillistes en 2008 qu'il acquiert une
stature nationale.
Réélu en 2012, il a à son actif quelques réussites
emblématiques, comme les Jeux Olympiques. Mais, plus que tout, sa personnalité
excentrique, mèche blonde au vent et blagues en bandoulière, séduisait.
Son art des coups de théâtre
n'est plus à prouver. Reste à découvrir ses talents en matière de diplomatie
internationale.
Maureen COFFLARD14 juillet 2016
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